MaPo est une femme en démarche diagnostique de Troubles du Spectre de l’Autisme. Elle témoigne de son parcours pour le GRAAF en attendant la restitution prochaine de l’évaluation.
Le diagnostic de TSA, et souvent sa cohorte de comorbidités, c’est comme aller prendre un train. D’abord, il y a comme une histoire de rythme dans le topo :
Itinéraire
Tout d’abord, avant d’être sur la piste d’un TSA, de type syndrome d’Asperger ou SA, il faut encore tomber sur le ou les spécialistes qui vont mettre des mots sur nos maux ou bien il faut trouver par soi-même, souvent par « hasard » (sûrement pas si hasardeux que ça), qu’on a quelques cases qui cochent bien le syndrome d’Asperger et parfois, ce sont les deux mis bout à bout qui vont nous y aider.
Mais très souvent, cela peut prendre des années. Années pendant lesquelles on sent bien qu’on déboîte un peu du bulbe, qu’on est hors norme quoi ! mais qu’on sait pas trop pourquoi, que nos proches voient confusément que toutes nos cases ne cochent pas le politiquement correct mais qu’ils n’en savent pas plus que nous sur le sujet, nous poussant parfois à être un peu plus normaux.
Bref, au menu du petit-dej, avant d’aller chopper le train de ce fichu diagnostic : confusion, inquiétude, solitude, épuisement physique/mental et tant d’autres joyeusetés.
Confusion
Parce qu’on sent quelque chose de différent, parfois sans trop vouloir se l’avouer. Oui, mais quoi ?
Inquiétude
Suis-je normale ? Et aussi : comment je vais assurer dans le futur si déjà aujourd’hui, j’ai du mal ?
Solitude
Personne ne voit réellement la quantité et l’intensité de nos difficultés et par voie de fait, personne ne nous les explique ni ne nous comprend. Sans compter qu’on a souvent l’air relativement intelligent tout en étant très souvent, si c’est pas constamment, à côté de la plaque ! Le ferions-nous donc exprès ?!!!
Epuisement
Camouflage bonjour ! On tente d’être à peu près normal, on veut s’intégrer, vivre une vie à peu près classique et rien ne marche jamais vraiment. Par contre, ce qui marche, c’est d’épuiser considérablement ses ressources énergétiques, tant mentales que physiques…
Donc, si par « chance », vous avez choppé l’hypothèse du SA et le train du diagnostic par la même occasion, alors bon courage, le calvaire ne fait que commencer ! Il ne faudrait pas dévoyer en cours de route ni que le train s’arrête tout court, pour ne parfois jamais repartir. Maintenant, il va falloir trouver un neuropsychologue au fait du SA (qui est en fait très mal connu en France), celui qui ne vous dira pas que vous êtes normale parce que vous regardez dans les yeux, que vous êtes mariée, que vous avez un travail. Et la compensation, ils y ont pensé dans cette société qui se veut normative au possible ? Bonne chance again ! Ils ne courent pas les rues ! Et by the way, j’espère que vous êtes riches (libéral) ou patient, très patient (CRA).
C’est là que vous, qui avez cogité toute votre vie sur ce qui pouvait bien débloquer là-haut (et je parle pas des cieux), vous cogitez encore plus : le spécialiste va-t-il être à la hauteur ? Va-t-il pouvoir réellement m’aider ? Me comprendre ? Fait-il passer des tests suffisamment à jour et cohérents ? Et moi : vais-je tenir le coup ? Me montrer suffisamment forte ? Réussir à maîtriser ce stress avant ces fichus rendez-vous, pendant et après ? Trouver la route, le cabinet, trouver une place de parking, arriver à l’heure, et ça, ce n’est qu’avant les rendez-vous. Et c’est aussi le quotidien, train mis à part.

En route pour un diagnostic !
Ça y est, vous y êtes à ces fameux rendez-vous !
Bien, c’est déjà un bon début. Et non, ce n’est pas la fin ! Cessez donc de vous agiter ainsi sur votre chaise, de vous balancer peut-être ? Et de vous tordre les doigts, d’emberlificoter nerveusement vos cheveux ! Ah quoique, ici, vous pouvez. Mais on vous a tellement appris à ne pas le faire. Ah et faîtes un effort voyons : ces sons ne sont pas si forts. Merci la musique de la salle d’attente, la voisine qui renifle un peu trop fort, son pied qu’elle tape négligemment, à moins que ce ne soit votre cœur qui bât un peu trop fort, ces lumières ne sont pas éblouissantes et il n’y a pas d’odeur particulière ! Un peu de concentration que diantre !
En tout cas, j’espère que vous êtes en forme, que vous avez moins d’insomnies, que vous n’êtes plus épuisée parce qu’il va falloir montrer ce que vous savez faire face à ces tests. Allez, on y va, on les fait ces tests après une bonne nuit blanche. Oui, quand on a autant de difficultés, on se raccroche un peu à ce diagnostic comme à une bouée de sauvetage ! Ce qui donne d’ailleurs l’impression que nous sommes Monsieur ou Madame « je cherche les problèmes » (élégant auprès d’autrui quand on a déjà l’air d’un ovni échoué sur terre).
Fin du voyage ?
C’est bon, vous les avez fait ? Si vous avez un travail, j’espère que vous êtes en vacances parce qu’il se peut fortement que vous subissiez une période d’hibernation prolongée. Tandis que vos ressources physiques s’en vont menu, le mental, lui, bien que tête contre terre, s’échine à montrer qu’il est encore là, lui. Et là, vos pensées vont et viennent comme un oscilloscope dysfonctionnel et ça fait des up and down pas très catholiques… Mais le train est lancé, à pleine vitesse, il emmène avec lui des espoirs de compréhension, des espoirs identitaires parfois où se mêlent la confusion et les certitudes… Au fond, ce train, il a très certainement des arrêts déterminés mais une station finale qui n’existe peut-être pas… il est lancé, mais s’arrête-il vraiment ?
MaPo
En savoir plus sur la démarche diagnostique d’autisme : Autisme Info Service